Henry Stephens Salt était un écrivain anglais réputé pour son œuvre, ses critiques littéraires et ses biographies. Socialiste et pacifiste engagé, il milita toute sa vie pour une reforme en profondeur des systèmes carcéraux, éducatifs et économique, ainsi que de la manière dont sont traités les animaux.
Un ouvrage pionnier
Henry Stephens Salt était un naturaliste et écrivain anglais réputé. Socialiste et pacifiste engagé, il milita toute sa vie pour plus de justice sociale pour les humains et les animaux. Paru en 1892, son livre « Les Droits de l’animal considérés dans leur rapport avec le progrès social » (Animals’ Rights: Considered in Relation to Social Progress) est considéré comme le premier ouvrage dédié aux droits des animaux.
Salt y défend l’idée qu’il n’y a pas de différence de fond entre les humains et les animaux et qu’il est impossible d’ériger entre eux une démarcation absolue avec d’un côté des personnes et de l’autre des choses. Ne négligeant aucune forme de cruauté, il désigne l’alimentation carnée comme la forme la plus meurtrière d’exploitation.
Selon lui, c’est l’absence de droits pour les protéger qui entraîne inévitablement cette dépréciation des animaux au rang d’objets inanimés et insensibles, soumis à d’innombrables sévices.
Les animaux ont-ils des droits ? Sans aucun doute, si les hommes en ont.
Henry Stephens Salt, Les Droits de l’animal considérés dans leur rapport avec le progrès social, 1892
À la portée philosophique et pratique
Pour sortir de ce système de domination des humains sur les animaux et dépasser la simple question du bien-être animal, trop souvent dévoyée, Salt s’attelle à décrire ce que devraient être ces « droits des animaux » pour les protéger du large ensemble de pratiques humaines dont ils sont victimes.
Il aborde de nombreuses questions liées à l’exploitation animale telle que l’alimentation carnée, la chasse, la fourrure et la vivisection. Il s’attaque également à l’incohérence des philosophes « moralistes » rejetant l’idée d’ « animal-machine » dénué de sensibilité (et développant des idées théories morales basées sur la compassion) tout en continuant à manger des animaux.
Soucieux de protéger les animaux de potentielles dérives (par exemple celles liées à l’expérimentation animale), Salt défend un utilitarisme dit « négatif » qui donne une plus grande priorité à la réduction de la souffrance qu’à l’augmentation du bonheur. Ainsi, il soutient qu’une activité qui nous procure un important plaisir au prix d’une faible souffrance imposée à un autre être sensible reste condamnable car le bénéfice, bien que plus important, n’est pas en mesure de compenser la souffrance causée.
Visionnaire sur de nombreux aspects, l’ouvrage se finit sur ces mots :
Pour conclure, je déclarerai énergiquement que cet essai n’est pas un appel ad misericordiam à ceux qui agissent ou qui excusent les autres d’agir comme nous le leur reprochons ici. Ce n’est pas un appel à la pitié (loin de là !) en faveur des « bêtes », dont le seul crime consiste à ne pas appartenir à la noble famille de l’homo sapiens ; c’est plutôt une adresse à ceux qui voient et qui sentent que, comme on l’a si bien dit, « le grand mouvement progressif du monde à travers les âges se mesure au développement de la bonté et l’affaiblissement de la cruauté », que l’homme, pour être vraiment homme, doit cesser de nier ses liens avec tout ce qui vit dans la nature, et que la prochaine réalisation des droits de l’homme aura pour suite la plus tardive mais non moins certaine la réalisation des droits de l’animal.
Henry Stephens Salt, Les Droits de l’animal considérés dans leur rapport avec le progrès social, 1892